Carnage
Synopsis
Dans un jardin public, deux enfants de 11 ans se bagarrent et se blessent. Les parents de la victime, Penelope (Jodie Foster) et Michael Longstreet (John C Reilly) demandent à s'expliquer avec la famille du coupable, Nancy (Kate Winslet) et Alan Cowan (Christoph Waltz). Les échanges, d’abord cordiaux tournent bientôt à l'affrontement. Où s'arrêtera le carnage ?
Fiche technique
Film français, allemand, polonais, espagnol
Année de production : 2011
Durée : 1h19
Réalisation : Roman Polanski
Scénario : Yasmina Reza, Roman Polanski
Image : Pawel Edelman
Avec Jodie Foster (Penelop Longstreet), Kate Winslet (Nancy Cowan), Christoph Waltz (Alan Cowan), John C Reilly (Michael Longstreet), Elvis Polanski (Zachary Cowan), Eliot Berger (Ethan Longstreet)...
Critique
En préambule, je voudrais revenir sur la question de la VO-VF, sujet qui a été à l’origine d’une polémique entre Chris et moi il y a quelques semaines. J’ai été de ceux qui ont le plus vivement protesté contre le retrait de 50/50 de la sélection du Festival d’automne au seul prétexte que sa diffusion en VO était insuffisante (je sais, nos motifs de révolte sont bien futiles !). Je reconnais cependant qu’un doublage raté peut non seulement dénaturer le jeu des acteurs, mais également nuire à l’atmosphère d’une œuvre. Carnage en est la preuve. Je dois en effet avouer que la bande annonce en VF de cette adaptation de la pièce de Yasmina Reza m’en avait donné une image à tout le moins faussée. J’avais en particulier trouvé l’interprétation de Kate Winslet à la limite de l’hystérie. Une impression corrigée par la VOST… Malgré cette concession à mes contradicteurs, je reste sur l’idée qu’il est préférable de regarder un film en langue étrangère en VF que de ne pas le voir du tout. En toute chose, je n’aime pas les positions extrêmes. Sauf en matière de Kâma-Sûtra, évidemment (Shame, sors de mon esprit !). Fermons la parenthèse…
Polanski nous rappelle avec Carnage que l’humain est un être pulsionnel dont le vernis de civilisation, d’éducation peut se craqueler à tout instant. Il suffit d’une parole, d’un geste, d’une simple allusion pour que les belles manières volent en éclat, que les instincts les plus primaires ressurgissent brutalement. Un propos qui n’est pas sans évoquer L’ange exterminateur de Luis Buñuel (1962), film dans lequel les invités d’un notable se trouvent, à la suite d’un étrange phénomène, dans l’impossibilité physique de sortir de la demeure de leur hôte. L’enfermement entraîne bientôt l’abolition des convenances, ce qui révèle la vraie nature de chacun. On songe également au Repas des fauves de Christian-Jaque (1964), qui met en scène sous l’Occupation un groupe de personnes réunies pour fêter un anniversaire. Suite à l’assassinat de deux officiers allemands, un agent de la Gestapo fait irruption dans la pièce où ont pris place les convives, enjoignant à ceux-ci de désigner deux d’entre eux comme otages pour être exécutés si les coupables de l’attentat ne sont pas arrêtés. Perdant toute dignité, les sept amis vont alors s’entredéchirer pour sauver leur vie. La thèse n’est donc pas nouvelle. Mais les comédiens de Carnage sont suffisamment remarquables et les dialogues ciselés pour faire de ce jeu de massacre en huis clos un spectacle jubilatoire, qui est aussi -sans doute- un règlement de compte personnel du cinéaste avec la société, la morale et le politiquement correct...
Les adaptations d’œuvres théâtrales au cinéma sont souvent assez pauvres sur le plan de la mise en scène. Reconnaissons que Polanski s’en sort ici avec virtuosité (avec la complicité de son chef opérateur attitré depuis Le pianiste, Pawel Edelman), se jouant des contraintes spatiales avec une caméra très mobile, qui passe d’un visage à l’autre au rythme soutenu des joutes verbales. On relèvera également le soin apporté aux accessoires, aux décors, conçus comme des personnages à part entière par Dean Tavoularis (Bonnie and Clyde, Little big man, Le parrain 1, 2 et 3, Apocalypse now, Outsiders, Rusty James, Jardins de pierre, Tucker, La neuvième porte, No country for old man). Dans l’appartement, chaque élément est ainsi révélateur de la mesquinerie du couple Longstreet. De la même manière, l'étroitesse d'esprit de Nancy et Alan est symbolisée par leur mise crypto petite-bourgeoise.
Ces détails permettent en outre à Polanski de stigmatiser le consumérisme, le matérialisme (Penelope et Michael se révèlent finalement plus soucieux de sauver leur Kokoschka, un catalogue d’exposition du peintre autrichien souillé par Nancy, que de régler effectivement le différent les opposant aux Dowan), la bonne conscience occidentale, qu’elle soit écologique ou humanitaire, l’addiction technologique qui désociabilise (Alan est incapable de décrocher de son mobile), le cynisme du monde des affaires… Polanski dresse un portrait au vitriol de notre société. Et ce, en seulement 79 minutes. Brillant et efficace !
Ces détails permettent en outre à Polanski de stigmatiser le consumérisme, le matérialisme (Penelope et Michael se révèlent finalement plus soucieux de sauver leur Kokoschka, un catalogue d’exposition du peintre autrichien souillé par Nancy, que de régler effectivement le différent les opposant aux Dowan), la bonne conscience occidentale, qu’elle soit écologique ou humanitaire, l’addiction technologique qui désociabilise (Alan est incapable de décrocher de son mobile), le cynisme du monde des affaires… Polanski dresse un portrait au vitriol de notre société. Et ce, en seulement 79 minutes. Brillant et efficace !
Ma note - 4/5
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